15 novembre 2009

Le voyage nocturne et l’ascension

Alors que le Prophète (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) traversait une telle étape où son appel se passait entre la réussite et persécution et où les étoiles de l’espoir commençaient à apparaître à l’horizon, s’ouvrit l’épisode du voyage nocturne et de l’ascension.

Il existe plusieurs versions quant à la datation de cet évènement ; par exemple:

1. Le voyage nocturne eut lieu au cours de l’année dans laquelle, Allah accorda le grade de « prophète » à Muhammad (d’après at-Tabari).

2. Il eut lieu cinq ans après le début de la mission (d’après an-Nawawi et al-Qourtoubi).

3. Il eut lieu le 27 du mois de Rajab de l’an 10 de la prophétie (d’après son Eminence al-Mansourfouri).

4. Il eut lieu dix mois avant l’Hégire c’est à dire au mois de Ramadan de l’an 12 de la prophétie.

5. Il eut lieu un an et deux mois avant l’Hégire, c’est à dire, au mois de Muharram de l’an 13 de la prophétie.

6. Il eut lieu un an avant l’Hégire c’est à dire, au mois de Rabi’al-Awwal de l’an 13 de la prophétie.

Les trois premières versions sont évacuées dans la mesure où Khadîja (qu’Allah soit satisfait d’elle) mourut au mois de Ramadan de l’an 10 de la prophétie. Or, sa mort eut lieu avant que ne fussent rendues obligatoires les cinq prières et, il n’y a aucune divergence sur le fait que l’institution des cinq prières obligatoires eut lieu lors du voyage nocturne. Quant aux trois versions restantes, je ne vois pas comment en privilégier une à l’exclusion des deux autres. Toutefois, le contenu de la sourate17 : ‘ le voyage nocturne’ montre que ce voyage a été très tardif.

Les Imams traditionalistes ont rapporté cet événement dans ses moindres détails. Nous allons, dans ce qui suit, faire un bref rappel dans ce sens.

Selon ibn Al-Kayyim, le Prophète (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) fit le voyage nocturne corps et âme, de la Sainte Mosquée à, Jérusalem, monté sur Al-Bourak et en compagnie de Jibril (Gabriel) (paix et salut sur eux).

Il descendit à Jérusalem, dirigea la prière des prophètes, alors qu’Al-Bourak restait attaché à la porte de la mosquée. Ensuite, ont le fit monter la nuit même, de Jérusalem au ciel le plus proche. Arrivé au premier ciel, Jibril demanda qu’on lui ouvrît la porte. Celle-ci lui fut ouverte. Il vit Adam, le père des hommes. Alors, il le salua et celui-ci lui souhaita la bienvenue, lui rendit le salut et reconnut sa prophétie. Allah montra ensuite à son Messager (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) l’esprit des martyrs à sa droite et celui des méchants à sa gauche.

Ensuite, on le fit monter au deuxième ciel ; Jibril demanda qu’on lui ouvrît la porte. Là, le Prophète (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) trouva Yahyâ ibn Zakariya et Isâ ibn Mariam, les rencontra et les salua. Ceux-ci lui rendirent le salut, lui souhaitèrent la bienvenue et reconnurent sa prophétie.

Ensuite, on le fit monter au troisième ciel où il trouva Youssouf et le salua. Celui-ci lui rendit le salut, lui souhaita la bienvenue et reconnut sa prophétie.

Ensuite on le fit monter au quatrième ciel où il trouva Idris et le salua. Celui-ci lui rendit le salut, lui souhaita la bienvenue et reconnut sa prophétie.

Ensuite, on le fit monter au cinquième ciel où il trouva Hâroun ibn Imran et le salua. Celui-ci lui rendit le salut, lui souhaita la bienvenue et reconnut sa prophétie.

Ensuite on le fit monter au sixième ciel où il rencontra Moussâ ibn Imran et le salua. Celui-ci lui rendit le salut, lui souhaita la bienvenue et reconnut sa prophétie. Lorsqu’il eut dépassé Moussâ, celui-ci pleura. Il lui demanda: « Pourquoi pleures-tu ? » Moussâ répondit: « Je pleure parce qu’on a, après moi, envoyé un jeune dont le peuple comportera plus que le mien, un nombre d’entrants au paradis.» Ensuite, on le fit monter au septième ciel où il rencontra Ibrahim (paix sur lui) et le salua. Celui-ci lui rendit le salut, lui souhaita la bienvenue et reconnut sa prophétie.

Ensuite, on le fit monter vers le Jujubier Céleste et après, vers Al-Bayt Al-Maamour.

Ensuite on le fit monter vers le Tout- Puissant duquel il s’approcha alors au point de n’en être séparé que par la longueur de deux arcs au moins. Allah lui révéla ce qu’Il lui révéla et lui imposa cinquante prières. En s’en retournant, le Prophète (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) passa devant Moussâ qui lui demanda: « Que t’a-t-il ordonné de faire? » Il répondit: « Cinquante prières. » Moussâ reprit; « Ton peuple ne supportera pas cela ! Retourne auprès de ton Seigneur et demande-lui de réduire cela pour ton peuple ! »

Le Messager d’Allah (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) se retourna vers Jibril, comme pour lui demander son avis. Celui-ci fit un signe voulant dire: « Oui, si tu veux », et ensuite le fît monter jusqu’au Tout- Puissant qui était à Sa place – selon la formulation d’al-Boukhârî à certains égards- Allah défalqua dix prières des cinquante. Le Prophète (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) redescendit, passa devant Moussâ et l’informa.

Celui-ci lui dit: « Retourne à ton Seigneur et demande-lui de réduire encore.» Ainsi, le Messager d’Allah (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) ne cessa de faire la navette entre Moussâ et Allah le Tout-Puissant jusqu’à ce qu’il ne restât que cinq prières. Moussâ lui conseilla de retourner demander une réduction mais dit : « j’ai honte de mon Seigneur. Je me contente des cinq ». Lorsqu’il se fut éloigné quelqu’un appela et dit: « J’ai imposé mon obligation et soulagé mes serviteurs.»

Ibn Al-Kayyim a ensuite rapporté une divergence au sujet de la question de savoir s’il a vu Allah le Tout-Puissant. Ce faisant, il a rappelé ce qu’a dit Ibn Taymiyya, à ce sujet. En définitive, la vue d’œil est fondamentalement une assertion sans consistance: aucun des compagnons n’en a parlé. Il est vrai que ce qu’on a rapporté d’Ibn Abbas fait état d’une vue absolue et d’une vue du cœur. Toutefois la première n’exclut pas la seconde. Ensuite ibn Al-Kayyim dit: « Quant à la parole d’Allah que l’on trouve dans la sourate 53 : ‘L’ étoile’- verset 8, à savoir :

« Puis il sa rapprocha et descendit encore plus bas »

elle ne signifie pas la même chose que « le rapprochement » que l’on trouve dans la sourate17 : ‘Le voyage nocturne ’. La parole contenue dans la sourate 53 : ‘L’ étoile’ rend compte du rapprochement et de la descente encore plus bas de Jibril comme l’ont noté Aicha et ibn Mas’oud. En tout cas, le contenu va dans ce sens. S’agissant du rapprochement et de la descente encore plus bas dans la sourate17 : ‘Le voyage nocturne ’, il ne fait aucun doute qu’il s’agit là du rapprochement et de la descente encore plus bas du Seigneur. Ce n’est pas la même chose que ce qu’il y a dans la sourate 53 : ‘L’ étoile’ où l’on note que le Prophète (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) vit une autre descente au Jujubier Céleste, à savoir celle de Jibril. Celui-ci a deux fois de suite été vu par Muhammad (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) sous sa forme véritable: une fois sur terre et une fois au Jujubier Céleste, mais Allah sait mieux que quiconque ce qu’il en est exactement. Certains rapports mentionnent que la poitrine du Prophète (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) a également été fendue à l’occasion et que celui-ci avait vu énormément de choses à cette étape. On lui présenta du lait et du vin et il choisit le lait. Alors, on lui dit: « On t’a guidé vers le bon naturel ou tu as choisi le bon naturel. Si tu avais choisi le vin tu aurais induit en erreur ton peuple. » Il vit quatre fleuves au paradis: deux fleuves externes et deux fleuves internes. Les fleuves externes sont le Nil et l’Euphrate dans leur principe. Les deux autres sont à l’intérieur du paradis.

Il se peut que le sens de l’évocation du Nil et de l’Euphrate soit une allusion à la réalité de la domination de l’Islam dans les régions correspondantes. Allah sait mieux que quiconque ce qu’il en est exactement. Il vit le gardien de l’enfer. Celui-ci ne rit jamais. Son visage n’exprime ni joie, ni détente. De même il vit le paradis et l’enfer. Il vit ceux qui, de leur vivant, abusaient des biens des orphelins par injustice à leur égard: ils avaient des mufles pareils à ceux des chameaux.

On projetait dans ces mufles des éléments de l’enfer pareils à des pierres qui leur sortaient par le derrière. Il vit les usuriers qui, chacun, munis d’un énorme ventre, ne pouvaient bouger de leurs places, alors que les gens du pharaon passant devant eux, pour être exposés à l’enfer, les piétinaient. Il vit les fornicateurs qui avaient en face d’eux une viande graisseuse et saine et, à côté de celle-ci une autre de mauvaise qualité et puante. Ils mangeaient de la dernière à l’exclusion de la première. Il vit les femmes qui attribuaient à leur mari des enfants qui n’étaient pas les leurs. Il les vit suspendues par leurs seins. Il vit les marchandises des gens de La Mecque à l’aller comme au retour et avait donné à ceux-ci des indications sur un chameau qui leur avait échappé. Il but de l’eau des caravaniers contenue dans un récipient à couvercle, à un moment où ceux-ci dormaient et, ensuite, laissa le récipient fermé, ce qui était une preuve de la légitimité de ses prétentions, le lendemain matin du voyage nocturne.

Ibn Al-Kayyim note: « Le lendemain matin, le Messager d’Allah (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) informa son peuple de ce qu’Allah, le Tout- Puissant lui avait montré comme grands signes. Alors, ceux-ci le démentirent formellement, le traitèrent avec acharnement. Ils lui demandèrent de leur décrire Jérusalem. Allah aussitôt lui éclaira la ville pour lui permettre de bien la voir. Ils commencèrent à l’interroger sur les signes qu’il avait vus mais ne pouvaient rien réfuter de ce qu’il avançait. Le Prophète (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) les informa sur la position et le retour de la caravane chargée de leurs marchandises. Il les informa su moment auquel devait arriver cette caravane. Il les informa du chameau qui ouvrait la marche et, toutes les informations qu’il apportait correspondaient à la réalité. Toutefois, tout cela les rendit plus hostiles que jamais car, les injustes qu’ils étaient, ne pouvaient que renier.

Selon ce qu’on raconte, Abû Bakr (qu’Allah l’agrée) fut appelé « As-Siddik » (le véridique) par référence à sa confirmation de l’événement alors que les gens en reniaient la réalité. La justification la plus incisive et la plus remarquable de ce voyage est la parole d’Allah exprimée en ces termes:

«… afin de lui faire voir certaines de Nos merveilles. … »

Sourate 17 : 'Le voyage nocturne'- verset 1

Telle est la loi d’Allah au regard des prophètes. Allah précise:

« Ainsi, avons-Nous montré à Abraham le royaume des cieux et de la terre afin qu’il fût de ceux qui croient avec conviction »

Sourate 6 : ‘Les bestiaux' verset 75

Il dit au sujet de Moussâ :

« Afin que Nous te fassions voir de Nos prodiges les plus importants. »

Sourate20 : 'Ta-Ha' - verset 23

Illustrant à cet égard l’application de Sa volonté, il dit: « Pour qu’il soit de ceux qui croient avec conviction ». Après avoir fondé la science des prophètes sur la perception des prodiges, Allah permet à ceux-ci de voir, par l’œil de la certitude, des réalités hors-destin ; or, l’information est tout à fait différente de la perception. Voilà pourquoi les prophètes supportaient dans la voie d’Allah ce que d’autres ne supportaient pas. Toutes les forces du monde réunies ne représenteraient auprès d’eux que l’aile d’un moustique. Ils n’accordaient aucune importance aux épreuves et aux supplices. La sagesse et les mystères que cachent les composantes de ce voyage constituent un domaine de recherche ayant alimenté les contenus des livres relatifs aux secrets de la Chariaa. Cependant, il s’agit ici de réalités simples qui, jaillissant des sources du voyage béni, déferlent vers les jardins fleuris de la Sira prophétique. Puisse Allah répandre sa bénédiction et sa paix sur le propriétaire de tels jardins. A cet égard j’ai tenu à mentionner tant soit peu de cette sagesse et de ces secrets.

Le lecteur aura constaté que dans la sourate17 (Al-Isra), Allah ne fait cas du voyage nocturne que dans un seul verset après lequel, il commence à faire mention des turpitudes et des crimes juifs, attirant l’attention de ces derniers sur le fait que le Coran guide vers les meilleures actions. Il peut en venir à penser que les deux versets ne sont pas liés, ce qui est loin d’être le cas car, Allah, par ce style, montre tout simplement que le voyage nocturne, en s’effectuant vers Jérusalem, signifiait que les juifs allaient perdre leur poste dirigeant de l’humanité, étant donné qu’ils avaient commis des crimes incompatibles avec leur maintien au poste et qu’Allah effectivement allait transférer le poste au Messager d’Allah (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) et mettre à la disposition de celui-ci l’ensemble des deux centres d’appel ( de propagande ) d’Ibrahim (que la paix soit sur lui). Il était temps de déplacer la direction spirituelle d’un peuple à un autre, d’un peuple dont l’histoire était remplie de lâcheté, de trahison, de péchés et d’actes d’agression, à un autre débordant de bonté et de bien et dans lequel le Messager continuait de jouir de la révélation d’un coran menant aux comportements les meilleurs. Cependant, comment devait s’effectuer le changement de direction alors que le Messager errait dans les montagnes de La Mecque, chassé par les gens ? Une telle question dévoile une autre réalité à savoir qu’un cycle de cet appel islamique allait toucher à sa fin et qu’un autre, différent du premier par son processus, allait commencer. C’est pour cette raison que nous constatons que certains versets comportent un avertissement sans ambages et une menace terrible, en direction des polythéistes :

« Et quand Nous voulons détruire une cité, Nous ordonnons à ses gens opulents (d’obéir à Nos prescriptions) ; mais (au contraire) ils se livrent à la perversité. Alors, la Parole prononcée contre elle se réalise, et Nous la détruisons entièrement. Que de générations avons-Nous exterminées, après Noé ! Et ton Seigneur suffit qu’il soit Parfaitement Connaisseur et Clairvoyant sur les péchés de Ses serviteurs »

Sourate17 : ‘Le voyage nocturne’- versets 16 et 17

A côté de ces versets existent d’autres précisant aux musulmans les bases, les clauses et les principes de la civilisation sur lesquels se fonde la société islamique. Tout se passe comme si ceux-ci s’étaient retirés sur terre, y géraient leurs propres affaires dans tous les domaines et constituaient une unité globale autour de laquelle, le Messager d’Allah (que la prière et la paix d'Allah soient sur lui) trouverait un refuge, un abri où se stabiliserait son affaire, un refuge qui deviendrait un siège à partir duquel il diffuserait son appel à travers le monde. Il s’agit là d’un des secrets de ce voyage béni, secret que nous avons choisi de mentionner dans la mesure où il se rattache à nos préoccupations de recherche.

En raison de cette sagesse et de bien d’autres lui ressemblant, nous constatons que le voyage nocturne eut toutefois lieu soit avant le premier acte de reconnaissance d’Al-Akaba, soit entre les deux actes de reconnaissance d’Al-Akaba. Allah sait mieux que quiconque ce qu’il en est exactement.

  • Auteur : Pr Safi Ar-Rahman al-Moubarakfouri, Pr de l'université salafiste de l'Inde.
  • Révisé par l'association Aux Sources de l'Islam
  • Extrait du livre "LE NECTAR CACHETE" Édition Darussalam
  • (Il est vivement conseillé aux frères, et sœurs de se le procurer.)
  • SourceIslam.com

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